samedi 27 septembre 2014

BÉCÉDI-BRIGNAN : À LA DÉCOUVERTE DES MONTS MAFA

Bécédi-Brignan est une localité érigée depuis 1997 en chef-lieu de Sous-préfecture par le décret présidentiel N° 97/18 du 15 janvier 1997. Situé dans la Région de la Mé, plus précisément dans le Département d’Adzopé et à 75 Km d’Abidjan, son ressort territorial est constitué par les villages de Bécédi-Brignan, Bécédi-Anon, Mafa-Mafou, Mopé et Zommun. Ce gros village de plus de 12 000 âmes (selon le recensement général de la population et de l'habitat de 1998) possède en son sein un patrimoine touristique qui mérité d’être promu : les Monts Mafa.

HISTORIQUE
Autrefois, les Béchiéduns (les originaires de la Sous-préfecture de Bécédi-Brignan) vivaient dans un petit hameau perdu dans la grande forêt giboyeuse des rives du Mafou, sur l’emplacement actuel des Mafas.
C’était un peuple de méchants, de fétichistes et dont la mauvaise vie indisposait fortement les voisins. Partout, on se plaignait d’eux. On les maudissait à longueur de journée. Toutes ces plaintes, ces murmures, ces soupirs et ces imprécations qui s’élevaient contre eux parvinrent bientôt aux oreilles de Dzeu, le Grand Odominga, le Dieu tout-Puissant, qui décida de les éprouver afin d’arrêter les mesures qui s’imposent.
Il choisit un dimanche, jour où tous les Béchiéduns se trouvaient au grand complet au village. Les hommes, après avoir adoré leurs fétiches, dégustaient paisiblement le bon bangui; gesticulaient inconsidérablement et riaient à gorge déployée sous l’arbre à palabre. C’est ainsi que Dzeu leur apparut subitement sous la forme répugnante d’un petit garçon couvert de pians avec une escorte de mouches. Une soif dévorante lui torturait le gosier. Il se dirigea aussitôt vers les hommes et demanda humblement à boire par pitié.
 Mais jusqu’à l’unisson, nos hommes, déjà surexcités par l’alcool, éclatèrent en injures et en insanités de toutes sortes à l’endroit de l’étrange inconnu. D’autres, à l’aide de bâton, de chasse-mouche et de poignée de sable, le ruèrent de coups qui le firent saigner atrocement. Ils ne pouvaient admettre qu’un étranger et, pire encore, une saleté de cette nature ait le courage de demander à boire le bangui dans leur unique kpako (gobelet pour servir le bangui).
 Le pauvre enfant cherchait vainement à sortir de la foule qui s’épaississait autour de lui, lorsqu’un homme, du nom de Seubi Bofé qui n’avait pas pris part au mouvement, réussit à l’extraire. Il le conduisit à son domicile, barricada sa porte pour le couvrir des coups qui continuaient à pleuvoir. Il lui donna ensuite à boire dans son gobelet de famille et nettoya le sang qui coulait de ses ulcères. Lorsqu’il se sentit un peu à l’aise et en sécurité, le pauvre petit garçon décida de regagner la forêt et demanda à son protecteur de l’accompagner.
C’était le moment décisif. À l’orée des bois, tous les pians de l’enfant disparurent. Il se transforma en un beau jeune homme au teint fortement clair et qui, sous les yeux de Bofé, commençait à grossir sans arrêt. Son corps prenait des proportions de plus en plus démesurées. Son teint de plus en plus clair illuminait toute la brousse comme sous l’effet d’une fournaise magique. Bofé compris alors qu’il avait affaire à un Kaman, un grand génie de la brousse. Il tremblait de frayeur au pied de son compagnon dont il n’atteignait plus le genou. Tout était devenu calme dans les environs. Et c’est là que le colosse prit la parole: "Bofé! Demain, dès l’aube, tu prendras ta femme, tes enfants, tes bêtes, tous tes biens. Tu quitteras ce village de mécréants et tu monteras vers le Nord à une douzaine de kilomètres d’ici. Tu  t’arrêteras sur ce vaste plateau que baignent le Kpanda et l’Ayilè (ce sont deux petits cours d’eau de Bécédi-Brignan), car c’est là que s’épanouira désormais ta vie de digne créature de dzeu, le Tout-Puissant. Obéis et surtout respecte l’heure, car quelques minutes après ton départ, il y aura calamité". Le Kaman disparut sur ces mots mystérieux et Seubi Bofé rejoignit sa maison dans une course effrénée.
Toute la nuit, il informa sa famille de la grande nouvelle et prépara fiévreusement ses bagages. Dès l’aube, il était prêt à conduire son monde vers la terre promise. Mais à son convoi manquaient sa fille aînée qui refuse de partir et le plus gros de ses coqs qu’il n’avait pas pu saisir. Comme il ne fallait pas perdre de temps, il fut obligé de partir.
À peine Bofé et les siens eurent-ils franchir 6 km sur l’itinéraire sacré que l’inévitable commença à se produire. Le ciel s’assombrit brusquement et le tonnerre gronda sept fois comme pour rappeler la durée de la création du monde. Puis, une lourde pluie de pierres fondues à température infernale s’abattit impitoyablement sur le maudit hameau. Les deux rangées de cases qui le composaient furent séparément ensevelies, donnant ainsi naissance aux deux Mafas.
Pendant ce temps, Bofé et sa suite continuaient paisiblement leur bonne vie sur cette "terre promise" qui devint BÉCÉDI-BRIGNAN d’où sont partis les Béchiéduns, les populations de BÉCÉDI-ANON, MAFFA-MAFOU et MOPÉ.
Pour manifester sa gratitude envers Dzeu, le Tout-Puissant, Bofé adorait régulièrement les Mafas. Ses descendants continuaient la tradition jusqu’à nos jours. Cette pratique a toujours conservé aux Mafas leur puissance qui se trouve encore dans le pouvoir magique de leur intarissable petit lac.

MAFAS, SITE TOURISTIQUE, D’ADORATION ET DE MERVEILLES
Aujourd’hui les Mafas, adorés par les membres de la grande famille Maffa Seumin, sont devenus un pôle d’attraction ou, mieux, un pèlerinage, un lieu de retraite spirituelle et d’excursion dans le département d’Adzopé voire dans toute la Côte d’Ivoire (pour ceux qui le connaissent). Ces monts, par leur caractère sacré, procurent des merveilles aux filles et fils du village et même aux visiteurs et excursionnistes "croyants". Chacun y va pour prendre sa part de bénédiction dans le petit lac intarissable. Le cas le plus patent est le bref séjour de l’artiste MEIWAY sur les Roches pour le tournage de son clip "Les génies vous parlent", lequel clip lui permit d’être quatre fois lauréat en 1998 aux éditions Cora et Africa Music Awards.
L’excursion se déroule une seule fois dans l’année pendant les vacances scolaires avec les diverses associations de jeunesse de la région et sous la direction d’un comité de gestion mis en place par le Ministère ivoirien du Tourisme et de l’Artisanat depuis 2012, année où le site « Les Monts Mafa » a fait son entrée dans le patrimoine touristique national ivoirien.

Source : ATSÉ N’CHO Jean-Baptiste, Bécédi-Brignan, regards sur un village akyé (ouvrage à paraître)


Une vue de loin du Mafa


Des excursionnistes dur le Mont Mafa

Le Mafa

Vers une pente du Mafa

Des excursionnistes pendant les vacances



Un attroupement d'excursionniste autour du lac intarissable
L'Ambassadeur des États-Unis sur les Monts Mafa de Bécédi-Brignan


La Sauce Biécôsseu en pays akyé

Le Biécôsseu (traduction littérale : "eau de piment" pour "sauce très épicée") est l'une des sauces préférées du peuple Akyé, dans le sud et sud-est de la Cote d'Ivoire. Voici un plat que Martine Liade Ikossie vous propose. Présentation : Tape Honoré. Bon appétit. 



Le peuple Akyé

Le peuple Attié (ou Atyé, ou Akyé, ou Akié) est un peuple de Côte d'Ivoire, qui fait partie du groupe Akan et vit au sud-est du pays, au nord de la ville d'Abidjan, dans la Région des Lagunes. Selon la tradition, les Attié sont venus du Ghana actuel pour s'installer en Côte d'Ivoire. 

On retrouve le peuple Attié dans plusieurs départements préfectoraux, dont celui d'Alépé. Il fait partie d'une des branches des Ashanti. Il est reconnu comme un peuple très jovial et festif qui a l'art des concerts avec des groupes musicaux reconnus au niveau national et africain. 

Les Attié parlent une langue du même nom : l'Attié (ou Akyé). L'Attié est une langue kwa parlée au sud-est de la Côte d'ivoire. Les langues kwa sont parlées aussi au Ghana, au Togo et au Bénin, et le nom kwa dérive du mot « peuple » qui, pour toutes ces langues, possède la racine commune « kwa ». L'Attié est, au sein des langues kwa, une langue minoritaire classée comme un isolat. C'est aussi une langue qui défie la plupart des analyses classiques par son système phonologique et grammatical peu commun. 

Les Attié sont organisés en trois classes d'âges ou générations appelées « Fokué » en langue Attié.Cette classification en trois classes d'âge leur est spécifique puisque, par exemple, les Mbatto, peuple voisin méridional, ont une organisation en six classes, que d'autres peuvent l'avoir en quatre, en huit, etc.

Ainsi, chez les Attié, dans ce système, toutes lespersonnes de sexe masculin font partie d'une des trois générations suivantes : 
- la génération Gnando, 
- la génération Djigbo,
- la génération M'Brechoué.

Les enfants en bas âge préparent très tôt leur entrée dans une classe en tant qu'observateurs des aînés et comme futurs membres à part entière d'une classe. 

Les critères d'appartenance à une génération sont simples. En effet : 
- tous les enfants qui naitront des M'Bréchoués appartiendront à la génération Djigbo, 
- les enfants des Djigbo formeront la génération Gnando, 
- les enfants des Gnando constitueront la génération M'Bréchoué, 
- et ainsi de suite…

Le Fokué est une danse sacrée d'inspiration martiale dont le rôle est d'initier les jeunes gens, dès leur entrée dans la première génération aux techniques de guerre héritées des temps anciens où les peuples luttaient pour leur survie et leur identité, mais aussi et surtout aujourd'hui à préparer l'insertion de ces jeunes dans leur société. 

Le Fokué est l'école pratique des Attiés, l'école d'apprentissages des choses de la vie. Toutes les manifestations de la vie politique, sociale et culturelle prennent leurs sources dans le cadre du Fokué qui s'exécute dans la structure de la génération.

L'exécution du Fokué se fait en deux étapes : 
- l'étape de Odo, la première, commence dès la proclamation de la génération. 
C'est l'étape de regroupement et surtout de maturité des plus jeunes groupes de la génération autour de la bonne pratique et de l'apprentissage du rythme sur le tambour de base nommé « Odo. » 

Dans un premier temps, les apprentis utilisent les tambours que leur prêtent les initiateurs mais, avant la fin de cette période, ils devront eux-mêmes construire leur propre tambour. A l'issue de cette étape, la génération fait une petite sortie officielleavec les tambours neufs.

- L'étape de San-Min constitue la période de maturité de la génération qui, désormais, est aguerrie et prête à tout. 
Elle danse donc à toutes les séances prévues par la législation jusqu'à sa grande sortie officielle. 
Après cette sortie, certains membres de la génération seront considérés comme aptes à prendre diverses responsabilités dans la gestion des affaires du village. 

Tout rituel de sortie des générationsest soumis à 9 grandes étapes cérémonielles qui permettent à une génération de prendre le pouvoir : 
- l'enrôlement des guerriers-danseurs, 
- la cérémonie de la marque de boue, 
- la présentation du sabre, 
- la prise du bois sacré, 
- la coupe de rameaux, 
- la sortie d'armes à feu, 
- l'invitation, 
- le Fokué, 
- la fête de génération.