jeudi 5 janvier 2012

Bouapé/ Revalorisation des chants et rythmes traditionnels en pays akyé - Le groupe Victoria perpétue la danse akpongbo

Bouapé. Bourgade de plus de 4 000 âmes, à environ 25 km d'Adzopé, canton N'Kadjé, situé dans le Sud-est de la Côte d'Ivoire. Il est 7 h 22 mn ce samedi 3 juillet 2010. La voie principale du village et les ruelles avoisinantes grouillent de monde. Hommes, femmes, enfants, tous apparemment agités, vont et viennent. Les maquis et autres bistrots de fortune jouent la musique tradi-moderne akyé à profusion. A Chikenzo, l'un des dix quartiers de ce village, l'ambiance est à son paroxysme. On danse. On chante. On boit. "Aujourd'hui, on va voir si le "Groupe Victoria" tient encore la route", lance un jeune homme d'environ 15 ans.
Victoria ? "En fait, il s'agit d'un groupe de danse traditionnelle créé dans les années 1930 par les premiers habitants de Bouapé. Même de nos jours, il continue de faire notre fierté dans l'exécution de la danse akpongbo. Si c'est pour ça que vous êtes venu, rendez-vous sur la place publique", nous indique Béda Nicaise (26 ans), qui sera par la suite notre guide. Avec lui, nous visitons d'abord les quartiers Dallas, Mbobabokoi et Zoo, avant de nous rendre à la place publique en question.
Le décor est planté
8h13 mn. Le décor est planté. Des bâches dressées soigneusement laissent entrevoir un cercle aménagé pour la circonstance. Spectateurs venus des quatre coins du canton N'Kadjé, autorités coutumières de la localité et autres curieux sont en place. Un cri lointain attire l'attention du public en joie. "Ceux qui ont pensé que Victoria a disparu à jamais auront tort. Le moment tant attendu est arrivé. Que tout le monde se mette debout", entend-on. Le public s'exécute et retient son souffle. Les habitués des lieux forment une double haie pour accueillir Victoria, après 2 ans d'inactivité. Les spectateurs exultent et tournent leurs regards vers l'endroit où le groupe tant attendu a choisi de faire son apparition. "Ils sont là !", crie un jeune homme dans la foule.
En effet, trois fillettes d'environ 9 ans et une nourrice à la tête d'une longue procession se trémoussent avec aisance. Plus d'une trentaine d'hommes et de femmes en bigarré avancent en chantant et en dansant au son d'un vieux tam-tam et d'une trompette coloniale. "Recevez à présent les danseurs de Victoria, après deux ans de passage à vide", annonce Kouao Kouao Guy Cyrille, 28 ans, conseiller du groupe. Et ce, sous les acclamations du public et l'oeil vigilant du chef de terre, Nanan Kouao Kouao dit Louis XIV. Plus le groupe avance, plus la place publique devient noire de monde.
Une fois parvenus dans le cercle du spectacle, les membres du groupe font un tour d'honneur, munis de petits mouchoirs aux couleurs nationales (orange-blanc-vert). C'est ce moment que choisissent deux vieilles femmes, le corps enduit de kaolin, pour répandre une poudre blanche dans tous les sens. "Elles sont en train de sécuriser le coin au plan mystique. Car sait-on jamais", confie notre guide.
Une dame entonne un chant
9 h12 mn. Une fois la mise en place terminée, une dame entonne un chant d'entrée que le public reprend en choeur. Trois jeunes danseurs, deux filles et un garçon, exécutent des pas de «n'dé», une danse traditionnelle bien connue dans la région, au son de trois tambours bien disposés dans un coin du cercle. "Djéouheu" (le plus gros, "Kpémbé" (le moyen) et "Kénéba" (le plus petit). Chaque tam-tam produit un son particulier.
Mais l'ensemble donne un son mélodieux qui emballe les danseurs selon le rythme", explique un voisin de gauche, un vieil homme qui semble s'y connaître. Pendant ce temps, les chanteuses du groupe interprètent successivement «Francisco» et «Assandé bobouéveu». Ici, les danseurs et les danseuses exécutent, tour à tour, des pas comme «Assafè-dépi», «Akendé» et «Assahougnan-hougnan», sous les applaudissements nourris du public. "La plupart des chants sont dédiés à des personnes soit pour leurs actes de générosité en faveur du groupe Victoria, soit pour leurs hautes qualités sociales", précise dame Yébi Chiépi Hélène, encadreuse de Victoria.
D'ailleurs, dans ce registre, le groupe entonne «Gbagbo bobouyeveu» dans lequel il chante : président Gbagbo, si on est content et on s'amuse aujourd'hui, c'est grâce à toi. A ce moment, Nanan Kouao Kouao et quelques notables du village font un tour d'honneur en esquissant majestueusement des pas de danse spéciaux en l'honneur des personnalités de marque. "Vous voyez que le seul nom du président Gbagbo a suffi pour que même les chefs se mettent à danser", fait remarquer notre guide.
Le show des trompettistes
Pendant ce temps, les deux trompettistes de Victoria, N'Cho Yapo François (65 ans) et Latto Méda Eric (30 ans), font une petite démonstration en faisant écouter au public, divers sons que sont capables de produire leurs vieux instruments juste bons pour un musée. "Bravo, bravo", crient des spectateurs émerveillés. Ils n'auront pas le temps de s'éclater car une jeune fille tombe brusquement en transe, en poussant des cris de détresse et en parcourant la scène dans tous les sens. "Ne vous affolez-pas, chers spectateurs. C'est juste pour annoncer l'étape la plus attendue de notre manifestation", explique Kouao Kouao Guy Cyrille. Qui, d'un geste discret, demande aux dames Assi Aho Mathilde et Yapo Chiayé, les formatrices du groupe, de changer de registre avec «Kaya Nobié Macen» et «Fami Ponniqué».
L'akpongbô
Dans le cercle du spectacle, les membres de Victoria font un tour d'honneur, munis de petits mouchoirs blancs, avant d'exécuter tour à tour des pas de «drapeau» et «apinzé» qui annoncent la danse «akpongbô». Et lorsque le vieux trompettiste N'Cho Yapo François et deux vieilles femmes se présentent dans le cercle pour leur tour de danse, c'est le délire. Le public ne boude pas son plaisir, en reprenant en choeur ces deux chansons populaires dans la région. Entre temps, ces trois «anciens» de Victoria se trémoussent sans arrêt à droite ou à gauche, en avant comme en arrière, avec une rare agilité dont eux-seuls ont le secret. Le tout, au son de trois tam-tams joués par des batteurs zélés, maîtres d'un rythme particulièrement saccadé. "C'est de l'akpongbô original. Cette danse ancestrale qui a donné d'autres dont vous avez vu, bien avant, un échantillon", poursuit Kouao Kouao. Qui révèle que le vieux tompettiste-danseur N'Cho Yapo est non seulement membre-fondateur, mais il est surtout l'actuel président de Victoria de Bouapé créé dans les années 1930.
Le spectacle tire à sa fin
13 h 40 mn. Le "spectacle" tire à sa fin. Les membres de Victoria entonne «Victoria dzé koileu» (Victoria retourne à la maison), un chant d'au revoir. Les photographes, pour la plupart des amateurs, font leurs dernières prises de vue. Pendant ce temps, notre compagnon qui a fini par savoir qui nous sommes en réalité lance ceci, sous-forme de plaidoyer. "Puisque vous êtes journaliste, informez le peuple ivoirien et le monde entier que la danse «akpongbô» existe toujours en pays akyé. Que le ministère de la Culture nous aide à la revaloriser". Un voeu que partage le vieux N'Cho Yapo et son groupe. Sous nos yeux, la place publique se vide peu à peu de son beau monde. Nous choisissons également de quitter Bouapé et son peuple fiers de leur akpongbo.


Par Patrice Tapé in Notre Voie du 16 septembre 2010, URL : http://www.notrevoie.com/develop.asp?id=31792

2 commentaires:

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