mardi 23 mars 2010

Rythmes du terroir : Et si la musique akyée nous était contée

Sur l’initiative de Monique Seka, auteur, compositeur, interprète, la musique akyé sera à l’honneur le vendredi 07 juillet prochain au palais de la culture à Treichville (Abidjan, Côte d'Ivoire). Gros plan sur cette musique qui s’impose.

L’histoire de la musique akyé remonte aux années 1956-1957. Anoma Brou Félix, Yapi René, Abenan Louis pour ne citer que ceux-là mettent sur pied les premiers orchestres. Notamment "l’Ivoiris Band", "les musicaux folklores d’Adzopé", devenu plus tard "le Yapi Jazz". Avec ces orchestres, ils font connaître leur culture, à travers la région. Les années d’après, ils procèderont à des tournées dans d’autres villes de l’intérieur. Leurs talents leur vaudront des œuvres musicales appréciées de tous. Le doyen Anoma Brou Félix, invité à certains évènements culturels, laissait entendre qu’il disposait plus de six cents (600) compositions dans son répertoire. Après la belle époque de ces vétérans, d’autres artistes de leur trempe vont se révéler. C’est alors que des orchestres de renom vont voir le jour. Il s’agit d’Audiorama orchestra, devenu le Tout-puissant Audiorama, les Rossignols d’Anaguié, les Messagers de la paix, Fidèles compagnons et Alobia Akounda. Feu Okoi Seka Athanase (père de Monique Seka) et autres s’assureront. Quelques années plus tard, Ahiwo orchestra puis Ahiwo international et N’gué orchestra seront mis sur pied. Atsé Hylarion, chef d’orchestre du second groupe musical, transfuge du premier, éclabousse de son talent.

Sources d’inspiration et thèmes

A l’instar des autres, les orchestres akyé s’inspirent des faits de société. Notamment la jalousie, la méchanceté, l’amour, la solidarité [et surtout les choses de la vie, notamment la mort]. Ils puisent dans la tradition qui tend la main à la modernité. Le tout se fond dans des genres musicaux pour donner de la couleur aux créations. Qui prennent source dans "l’Akô", une danse des temps anciens, rythmé par les sons de tambours et clochets emmêlés aux sons de bouteille. L’osmose se produit avec "l’ayô" qui est une polyphonie incantatoire pour chasser le mauvais sort. "L’ako" et "l’ayo" en symbiose donnent la rythmique nouvelle à partir de laquelle ces orchestres guident leurs notes musicales modernes. Qui font aujourd’hui leur fierté. Ce nouveau traitement des musiques d’inspiration traditionnelle confère à ces orchestres l’universalité de leurs créations. Anon Anon Joseph, l’un des piliers de la musique akyé nous en dit plus. « La musique akyé se fait respecter aujourd’hui parce que ceux qui la pratiquent, sont talentueux ». A côté de cela, il note aussi la disponibilité de certains cadres qui, de façon volontaire, mettent la main à la poche. «Grâce à eux, on peut parler de tous ces orchestres. J’ai contribué à la formation de plusieurs orchestres akyé. Aujourd’hui, j’ai pris de l’âge, donc je vais préparer ma retraite. Il est temps de céder la place aux plus jeunes. Et c’est ce que je m’attellerai à faire dans les jours à venir. Grâce à la musique, je me suis fait des relations avec des personnalités de la place. Je vous apprends que c’est moi qui étais l’homme à tout faire de l’orchestre de la gendarmerie nationale ». Ceci caractérise les créations de la nouvelle génération de chanteurs que sont Monique Seka, Joëlle C, Alain Demari

Conditions de vie des musiciens

Contrairement aux membres des autres groupes musicaux, les musiciens des orchestres akyé mènent une vie bien rangée.
Tels des professionnels, tous les membres des orchestres akyé perçoivent mensuellement un salaire et sont logés par leurs responsables. Cette organisation leur permet de choisir chacun son quartier général. En ce qui concerne l’orchestre Ahiwo international, ce jeune groupe a élu domicile dans la commune d’Anyama. Un cadre de la région d’Adzopé, sous le couvert de l’anonymat, a à son tour apprécié le geste de ses camarades. « Nous devons en principe témoigner notre soutien aux artistes de chez nous. Cela passe nécessairement par l’achat des orchestres. Si vous voyez aujourd’hui que l’on parle de la musique de chez nous, c’est parce que les artistes travaillent dans de bonnes conditions. Seuls les membres d’orchestres akyé perçoivent mensuellement un salaire. Même s’ils ne jouent pas. Qui peut le faire dans ce pays ? Personne. Ils sont aussi logés. Cela prouve combien de fois nous aimons notre culture. Nos camarades des autres régions devraient en faire autant. Mais ce n’est pas ce que nous constatons malheureusement ».

Tournées et discographies

Afin de mieux promouvoir leur culture, les orchestres akyé se produisent régulièrement à l’occasion des soirées. En ce qui concerne Ahiwo International, ses concerts à Abidjan se déroulent au Maquis du château à Abobo-Avocatier (son temple) et au complexe bar éclat à Yopougon-Niangon. En plus de ces lieux de prédilection, ce groupe musical a aussi animé des soirées à l’intérieur du pays et dans la sous-région. Il a participé du 11 juin au 14 juillet 1999 à une tournée en France. Celle-ci a été ponctuée par trois concerts. Deux à Orey du Bois et un à la salle LSC à Saint Denis. Le tout suivi de l’enregistrement de l’album "Paris 2000" arrangé par Bamba Moussa Yang. Pour la discographie, le groupe Ahiwo international dispose d’un effectif d’une dizaine d’œuvres musicales. Citons pêle mêle "Espoir" en mai 98, "persévérance" (décembre 98), "Paris 2000" (décembre 99), "Union" (en mars 2000), "Sensation" (décembre 2000), "Tour de contrôle" (décembre 2001), "Arc-en-ciel" (décembre 2002), 1er best of "Ebié sinbin" (avril 2003).

L’occasion sera une fois de plus donnée aux mélomanes et aux amoureux de la musique Akyé d’apprécier le talent de ces musiciens, auteurs compositeurs et interprètes vendredi prochain. Sous le coup de 21 heures au palais de la culture à Treichville. Lors du festival de la musique Akyé, une idée de Monique Seka. La fête sera belle avec la participation d’Alain Demari, Lato Crespino, Joëlle C, Monique Seka et bien d’autres orchestres akyé.

Un article paru dans le quotidien ivoirien "Le Front" du 04juillet 2006 et en ligne sur http://news.abidjan.net/article/?n=199751

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